• Thierry Le Luron: l'art du tir

      Thierry Le Luron: l'art du tir  

    Il a l'apparence d'un lutin. A l'intérieur, on sait aujourd'hui qu'il y avait un tempérament  excessif, drogué de la vie, voulant tout au maximum. N'hésitant pas à confier en interview qu'il se refuse à connaître les limites. Et que son objectif principal serait même de les dépasser. Ce qu'il accomplira largement. 

     

    L'art de l'impertinence pertinente  

     

    Mélange de gendre idéal à la française et de bombe à retardement plus ou moins bien dissimulée. Beau garçon, "baby face" dirait-on aujourd'hui. Petit (1,65 m), racé, rapide et élégant, il a hanté les écrans et les actualités des années 70 en étant un imitateur moderne, première star dans cette profession. Il distille alors des vacheries mais ça reste raisonnable - malgré une première censure sous Pompidou. La décennie suivante, qui lui sera fatale, le verra se transformer en pamphlétaire intégralement corrosif, acharné du direct, armé d'un culot qui n'est plus imaginable aujourd'hui. Un homme pratiquant son métier d'une autre façon après avoir été bouleversé par la découverte aux Etats Unis de Lenny Bruce, humoriste carrément enfermé par le pouvoir.  

    Thierry Le Luron se transforme alors en journaliste ultramoderne à la plume acérée. Il y aura eu lui, Coluche et Desproges. Les piliers d'un humour moderne, parfois décalé, mais avant tout ne se justifiant que par la drôlerie pure et simple et l'intelligence du propos. Ni cause ni jugement, rien de verbeux, l'art de l'impertinence pertinente. Comme Coluche le disait à son sujet au plus fort de la tempête qui le frappait, entre censures et redressements fiscaux punitifs: "La seule règle valable, c'est de savoir s'il est drôle. S'il l'est, il a raison". 

      

    L'esprit est en alerte permanente, sur chevaux légers, bondissant, rebondissant sur tout ce qui passe à sa portée. Au service d'une seule cause: le trait d'humour, la vacherie, voir la flèche assassine. Et plus la fin approche, plus sa rosserie prend de l'ampleur. Jusqu'à quitter la scène, deux mois avant d'en faire de même avec la vie, en saluant le public: "Le mourant vous salue, merci! Je dois vous quitter, excusez-moi, ma tombe ferme à minuit!". 

    Thierry Le Luron: l'art du tir

     

                                                                                                                   Juillet 1986

     

    Ecouter Thierry Le Luron millésime eighties aujourd'hui permet de réaliser la modernité du bonhomme: la moindre intervention foisonne de sous-entendus, de jeux de mots cruels, de saillies tranchantes qui visent la classe politique autant que le show-business. Les travers sont impitoyablement disséqués, mis en avant. Jouant d'une caricature que les imitateurs ou humoristes d'aujourd'hui ne parviennent toujours pas à égaler, porté par la grâce de l'intelligence et soumettant son monde parce qu'on ne se fâche pas avec le talent quand il est aussi évident, le lutin breton maniera l'art du tir avec une dextérité sans faille. 

      

    Pour apparaître, 25 ans après sa mort, dans toute sa complexité.  

    Emissions, livres et témoignages ont levé le voile sur cette part de lui-même qu'il cherchait à ne pas faire connaître. Et enfin, le livre de sa soeur, Martine Simon Le Luron. Le contexte de sa maladie importe peu. Dans le milieu, depuis des années, chacun sait. HIV, maladies opportunistes (une méningite virale dans son cas pour ouvrir le feu), suivie d'un cancer des vois respiratoires et digestives supérieures. Sa vie privée? Négligée, pratiquement inexistante, ce qu'il confiera être une grande souffrance dans ses derniers jours. Deux compagnons avérés, Jorge Lago (emporté par le Sida en 1986) et Daniel Varsano (emporté également en 1988). Quelques aventures féminines également. Discrètes, toujours. Et une vie nocturne poussée à son maximum, se clôturant, après palaces et clubs selects, sous les ponts de Bercy ou dans des endroits auxquels seuls les initiés ont accès. En résumé, homo, mâtiné de bi, paix à son âme, on s'en fout.  

    Et même si on ne s'en fout pas vraiment, on fera comme si par respect pour un homme obsédé par la pudeur et la discrétion.

     

    Martyr

     

    En revanche, son courage et sa dignité face au mal qui le ronge la dernière année de son existence laissent entrevoir un homme attachant, hypersensible, totalement sacrifié à son art. Dormant 20 heures par jour pour deux heures de scène. Témoin lucide du milieu cruel dans le quel il évolue et qu'il dirige en partie. Ce milieu qu'il a raîllé depuis quinze ans et qui le sachant affaibli n'hésitera pas à le déclarer mort ou mourant des mois durant. Dans sa dernière année, Le Luron manifestera sur scène des problèmes de mémoire, éprouvera certains soirs de grandes difficultés à se mouvoir... les salles sont pleines depuis plus de deux ans mais la rumeur file néanmoins à toute allure: le lutin qui se paye tout le monde a un genoux à terre. Petit mais pugnace, Thierry Le Luron devait ouvrir le 29 octobre 1986 un nouveau spectacle au Palais des Congrès.  

    En entonnant, avec la voix de Brassens:  

      

    "Je voudrais m'adresser 

    Avant de commencer 

    A tous ces empaffés 

    Qui m'avaient enterrés  

    Prématurément, je le jure..." 

     

    Un lever de rideau en forme de bras d'honneur, colère mal contenue entre les lignes.  

    Le 13 octobre 1986, précisément un mois avant sa mort et tout juste la veille du commencement de son martyr en reclus au Crillon, il dédie sans le savoir sa dernière journée professionnelle à des interviews, dont une sur Europe 1 face à Jean-Pierre Elkabach. Confession effarante, fuite de nerfs et l'âme en peine. On y entend, longuement, un homme blessé et se débattant malgré tout, alors qu'il se sait parfaitement condamné. 

    Extraits: 

     

    TLL: La gauche au pouvoir de 81 à 86 a été pour moi une source de succès non négligeable, je suis resté 3 saisons, c'est à dire 84, 85 et jusqu'au 16 mars 86 au Gymnase, il y a eu 240,000 spectateurs et je crois que je dois détenir le record de recettes d'un one man show en France. 

    JPE: Alors merci Monsieur Mitterrand? 

    TLL: Hein? 

    JPE: Merci Monsieur Mitterrand? 

    TLL (catégorique): Oh ben... surtout merci au public pour sa fidélité. 

    JPE: Mais c'est vrai que vous n'avez pas fait de cadeaux à la gauche depuis 81... 

    TLL: Rapellez-vous que je n'avais pas fait beaucoup de cadeaux au Président Giscard d'Estaing autrefois, puisque le Canard Enchaîné m'avait traité de persifleur numéro 1, ce qui demeurera pour moi longtemps ma légion d'honneur. Je dois dire aussi qu'il y a des gens comme Pasqua et Pandrau qui sont merveilleux pour des humoristes... [dans le spectacle] il y a une chanson où j'imite [Henri] Salvador, c'est sur l'air de Syracuse et je dis: "Je trouve que parfois Chirac use / Quand il laisse tout faire à Pasqua / Lequel après trois verres de Suze / C'est vraiment bonjour les dégâts / Si tu es arabes ou bien nègre / N'oublie pas tes papiers chez toi / Les flics, sûrs que tu es de la pègre / Ne feront pas les somations deux fois"... 

    JPE: Alors, mais... qu'est-ce que vous avez fait pendant tout ce temps où vous avez disparu? 

    TLL (colère sourde): Alors écoutez, je voudrais quand même rectifier un petit peu le tir parce que... heu... j'ai lu un jour dans le Journal du Dimanche au mois de juillet, j'ai vu une photo de moi avec comme légende, c'était le 10 juillet: " cette photo est un document, elle se veut surtout rassurante car c'est la première apparition en public de Thierry Le Luron depuis le mois de décembre 85", alors ce qu'on oublie de dire c'est que, heu...parlons franchement, parlons des rumeurs! Heu... j'ai effectivement fait un petit séjour à l'hôpital, quand je dis un "petit" séjour, c'est parce que c'était un court séjour, huit jours en tout et pour tout, pour une méningite virale qui était, heu... grave, dont j'aurais pu ne pas réchapper, ou qui aurait pu me laisser paraplégique ou à l'état de légume, il y avait une quatrième solution c'était que je m'en sorte et ça a été le cas... Je suis resté plus de deux ans sur une scène à Paris, là je fais une rentrée heu, j'ai quand même arrêté le 16 mars, je fais une rentrée le 29 octobre, Guy Bedos, lui, fait une rentrée tous les deux ou trois ans et moi quand on ne m'a pas vu depuis quatre mois, ça y est, on m'enterre, alors, heu... je ne vous cache pas que ça m'a affecté, beaucoup et... (glacial) je n'étais pas misanthrope, et bien je le suis devenu. 

    JPE: A ce point? C'est à dire? Qu'est-ce qu'il y a comme effets, qu'est-ce qu'il y a comme changement par rapport... 

    TLL: Heu... par exemple je sortais très souvent à Paris, dans les restaurants, dans les boîtes, on ne m'y voit pratiquement plus jamais... 

    JPE: Oui, mais alors là, vous jouez dans le sens des rumeurs... 

    TLL: Là, pour vous dire, alors, ça m'est complètement égal. Si je dois quelque chose, c'est au public, mais le... ce que l'on appelle les gens du tout-Paris, qui sont toujours les deux mille cons qui sont invités partout et qui vous chient dessus après, j'ai plus envie de les inviter ni de les fréquenter... 

    JPE: C'est un milieu méchant? 

    TLL (glacial): C'est un milieu de tapettes insignifiantes qui ne se complaisent que dans la fiante... 

    JPE: Vous dites là que vous en avez souffert, d'ailleurs, je ne vous ai pas posé la question... 

    TLL: J'en ai souffert parce que je ne suis pas une statue de cire du musée Grévin, parce que j'ai une grand-mère qui a 87 ans, une mère qui fait de la dépression nerveuse, j'ai une soeur aussi, à qui on a dit que, heu... il y avait eu un cours à la Sorbonne, où on a fait ma nécrologie... 

    JPE (ébahi): C'est extraordinaire... 

    TLL: C'est à dire que j'ai entendu tellement d'horreurs que je me suis retiré à Saint Tropez où j'ai donc écrit 80% de ce spectacle qui démarre le 29 octobre. 

    JPE: On peut dire: Thierry Le Luron, ça va? 

    TLL: Et bien, écoutez, vous viendrez voir! 

    JPE: Ca va, et pour longtemps? 

    TLL: heu... vu l'état des locations on annoncera bientôt des prolongations! 

     

    34 ans pour en arriver à l'exact contraire: baisser de rideau, isolé dans la suite 440 du Crillon sous le nom de Mr Roy, reclus, entouré du professeur Schwartzenberg et d'infirmières. Il décline à toute allure. Les rares visiteurs ne le voient pas, il a fait installer des paravents. Qui? Des amis triés sur le volet, les rares qui n'ont pas colportés les rumeurs en se réjouissant de ses difficultés. Chantal Goya, Jean-Jacques Debout, Sylvie de la Rochefoucauld, Jacques Chazot. Il accepte des contacts épistollaires avec d'autres, envoyant des petits mots à ceux qui lui témoignent amitié ou soutien: Guy béart, Léon Zitrone, Giscar, Chirac et même Mitterand. Son état se précipite en deux semaines: il devient sourd, son teint vire au vert, il fond comme neige au soleil. Il ne peut plus s'exprimer, ne peut plus s'alimenter ni boire. Des tumeurs envahissent son estomac, ses intestins. Il reste douloureusement conscient, pratiquement jusqu'à l'extrême fin. Sa soeur, présente dans la chambre à côté de la sienne le 12 novembre au soir, témoignant d'une voix murmurant "Non... Non..." alors qu'un tsunami cancéreux l'emporte loin de la vie, loin de Paris, loin de ce microcosme qu'il a dominé de sa modeste stature, par la grâce du talent, de l'intelligence, du sens de la formule. 

     

    Eclosion du pamphlétaire

     

    L'emmerdant c'est la rose

     

    Le quotidien La voix du Nord titre en 1985, après son passage à Lille: Le Luron: au son du canon. Le journaliste s'extasie devant l'aisance du showman, l'efficacité de la mise en scène et cette voix prodigieuse qui reproduit avec une exactitude parfaite celles des autres. Il souligne la qualité rare de la prestation, mais s'étrangle quelque peu devant l'avalanche de vitriol visant la gauche au pouvoir. On lui reproche d'être réac, d'être un humoriste de droite. Rien n'est aussi faux, mais la France raffole des étiquettes et si un artiste ne milite pas pour la gauche, il est forcément de droite.

    Thierry Le Luron refuse d'être récupéré et tape sur le pouvoir en place.

    Ce qui est vrai en revanche, c'est que la gauche lui aura offert une invraisemblable publicité en tentant de le faire taire, ce que la droite de Giscard a eu l'intelligence de ne jamais tenter. Au plus fort des persiflages de Thierry à Marigny en 1981, en face de l'Elysée, personne ne cause d'ennuis à l'humoriste. Le président assume même la liberté de ton du spectacle en y assistant. Le Luron ne modifie pas une ligne de ses textes et rentre en scène, accompagné de Teddy, son labrador noir (identique à celui du président) portant un collier de diamants étincelants et lançant, avec la voix de Giscard: Bonsoir Mesdiams, Bonsoir Mesdemoiselles, Bonsoir Messieurs. S’ensuit une véritable séance de mise à mort verbale, où les sous-entendus quand à l’affaire des diamants, la filiation aristocratique achetée, le train de vie royal, les safaris, les relations avec l’Iran, tout passe à la moulinette en quelques minutes. Le président beau joueur rit jaune, blêmit par moments, mais accuse les coups sans broncher. Il finit par rire également, surtout lorsque ses rivaux en prennent pour leur grade à leur tour.

    Il finira par saluer l'imitateur au cours de l'after-show. Le dialogue est courtois et il faudra laisser cette qualité à Giscard. Coluche n'avait pas eu à s'en plaindre non plus puisque, et cela se sait beaucoup moins, il entretenait également des rapports cordiaux avec le président qui appréciait sa verve.

     

    En revanche, la gauche au pouvoir va signifier pour Thierry un bras de fer qui va virer à l'affrontement: censure en télé et radios, agression verbale du premier ministre Laurent Fabius, de son épouse, redressements fiscaux surprises.

     

    Le plus consternant est qu’il aurait suffit au président Mitterrand d’assister comme son prédécesseur à un spectacle et de poser pour une photo aux côtés de Le Luron pour désamorcer ses bombes. Ce qui ne se fit jamais, bien au contraire, puisque la seule fois où ils se sont tous deux retrouvés au même endroit en même temps, alors qu’ils déjeunaient tous deux séparément à la brasserie Lipp en 1981, le président est allé saluer le convive de Thierry en ignorant ce dernier de façon tout à fait ostensible. Le Luron en prend bonne note. Et aussitôt qu’il est invité à ouvrir la cérémonie des Césars 1982, première manifestation d’importance sur le service public depuis l’avènement de François Mitterrand moins d’un an plus tôt, il ne perd pas l’occasion d’être le premier à ouvrir le feu.

     

    Dans la salle figurent Roger Hanin, Christine Gouze, Jack Lang et plusieurs huiles socialistes.

     

    Thierry déboule, une rose à la main, lunettes carrées.

    Jouant sur les double sens de dizaines de titres de films, il parvient quand même en cinq minutes à arroser l’entièreté du gouvernement:

     

    « Bonsoir ! Monsieur le Ministre… chers acteurs, chers actrices… chères comédiennes, comédiens, techniciennes, techniciens, réalisatrices, réalisateurs, ma chère belle-sœur, mon cher beau-frère… j’espère que je n’ai oublié personne… j’ai été élu, le 10 mai, démocratiquement comme vous le savez de par Dieu et devers les français… auparavant je n’avais jamais perdu mon temps, qui s’ignorait comme acteur à l’époque…vous voyez la tournure que ça va prendre…J’adore le cinéma ! Voyez-vous, mes biens chers frère, en ce troisième dimanche après la pentecôte (s’interrompant) mais qu’est ce que je raconte, moi, heu… et le cinéma, ça me connaît ! Aussi, il est normal que je sois là, ce soir, de-de-de-de devant vous… n’ais-je pas après tout été le réalisateur de « The Rose » ? N’aurais-je pas pu être aussi aux côtés de Gabin et de Fresnay dans « La Grande Illusion » ? Ne suis-je pas enfin l’un des héros de « La folle histoire du monde » ? Que fais-je ici ?

    Certains disent que les Césars ne sont fréquentés, enfin, que la Nuit des Césars hein, bien sûr, c’est vrai, c’est vraiii… La Nuit des Césars n’est fréquentée que par des gens riches et célèbres… Ben il n’y en aura bientôt plus, hein… c’est une espèce en voie de disparition chassée par Laurent Fabius, le célèbre héros de « Prends l’oseille et tire-toi ». Depuis le « coup de torchon » du 10 mai, et bien j’ai mis « les uns et les autres » en « garde à vue », et croyez-moi, il n’y aura pas de « grand pardon », ni pour les « aventuriers de l’arche perdue » de l’UDF ni pour les « têtes à claques » du RPR qui prétendent que mes réformes vont coûter « mille milliards de dollars » et que nous faisons –vous pourriez le dire, chère Carole Bouquet- que nous faisons tout « rien que pour vos yeux ». Ce sont là à mon sens des « comptes de la folie ordinaire ».

    J’aime le cinéma… je me suis d’ailleurs entouré d’acteurs célèbres, qui tournent ou ont tourné dans les plus grands films, enfin, vous vous en souvenez certainement, hein… Claude Cheysson : « Tais-toi quand tu parles », « Fais gaffe à la gaffe »… Gaston Deferre, un vieux classique : « Main basse sur la ville »…et « Quand passent les six cognes »… Michel Rocard : « Nous nous sommes tant aimé »… Charles Fitterman : « Espion, lève-toi »…(plan sur Yves Montand rigolard et Simone Signoret outrée) Edith Cresson : « La chèvre »… Charles Hernu : « Les bidasses dans la mélasse »… Michel Jobert (faisant mine de chercher au ras du sol) : « Little Big Man »… Yvette Roudy : « Les hommes préfèrent les grosses »… et le premier de mes ministres, Pierre Mauroy : « Un éléphant ça trompe énormément ».

    Et bien, je vais maintenant vous lâcher les baskets et laisser place à la cérémonie de remise des Césars, de toutes façons, nous voilà dans le même bateau, à la fin de mon septennat vous ne serez peut-être pas « tout feu, tout flamme » mais croyez-moi, ces réformes, ces changements seront digérés, c’est une péripétie de l’histoire qui dira, un peu plus tard : « autant en emporte le vent ».

     

    Tonnerre d’applaudissements et plan sur le visage de Roger Hanin, sourire crispé, regard vexé.

     

    L’entourage présidentiel décide dès cette soirée de fermer les plateaux et les ondes au trublion et d’assortir le tout d’un premier redressement fiscal.

     

    Thierry Le luron, après avoir constaté que sa séquence dans une émission de Patrick Sabatier a été tout simplement coupée, écrira au Président une lettre sous forme de déclaration de guerre se terminant de façon très diplomatique par: 

     

    "J'espère que pour ce Noël vous avez donné ses étrennes à Hervé Bourges (patron de TF1). Ca se fait pour les domestiques". 

      

    Il entre en conflit permanent avec la gauche de Mitterrand et il faudra attendre qu'il soit à l'agonie pour que ce dernier, sensible à son combat contre le cancer, lui fasse parvenir une missive lui garantissant toute sa sympathie. 

     

    Il est probable que François Mitterrand n'a jamais demandé une censure d'aucune sorte à l'encontre de Thierry Le Luron. 

    Il est en revanche certain que plusieurs actions ont été menées à l'initiative de sa cour dévote.  

    Guy Bedos, qui n’a pas hésité à traiter son collègue humoriste de réactionnaire, profite quand même de son Jeu de la vérité avec le même Patrick Sabatier pour poser la question qui fâche: pourquoi avez-vous censuré Thierry Le Luron? Sabatier répond que sa prestation pouvait apparaître comme une critique un peu acerbe des vœux présidentiels diffusés avant l'émission... le présentateur fait donc un aveu involontaire consternant: une chaîne nationale et publique prend garde à ne point contrarier le pouvoir et situe un humoriste comme un cause plausible de problèmes avec ce dernier. 

     

    A dater de ce moment, Thierry Le luron n'acceptera de passages télés qu'à la condition du direct, allant jusqu'à ne pas répéter les vrais textes lors des balances sur plateau et ainsi conserver sa liberté de ton à n’importe quel prix.

     

    Radicalisation radicalisation

     

    Thierry Le Luron entame son nouveau spectacle, « Le Luron en liberté », au théâtre du Gymnase en 1984. Il y créée le personnage de Monsieur Glandu pour toute la première partie. Le personnage en lui-même est le vecteur idéal qui lui permet d’aller encore plus loin : empoignant un imperméable qu’il dit dater de l’épuration, ajoutant qu’il est assez dégueulasse et qu’il appartient à un monsieur qui l’est non moins, il devient Glandu, concierge revanchard, véritable commère langue-de-pute, et se présente comme faisant une carrière parallèle à celle de Mitterrand en ces termes : « Pétainiste sous Pétain, Mendèsiste sous Mendès-France, socialiste du 10 mai 1981 au 11 mai 1981 »… confie qu’il a croisé Mitterrand et Fabius sur le trottoir en faisant pisser son chien (Teddy, qui sur scène avec lui !) et en sortant les poubelles, ajoutant « qu’il était même étonné qu’il y ait encore deux ordures qui traînent »… se rapproche de la salle et lui confie à voix basse : « Ces conneries-là vous gardez ça pour vous, après, on a des redressements fiscaux, des machins… »… et tout le monologue est du même acabit, mettant en pièce le président, son entourage, Yves Mourousi contre qui Thierry a une dent plutôt acérée, et plusieurs éminences du show-bizz, de la politique et des médias.

     

    Suivant son état et l’actualité, Glandu / Le Luron tient une revue de presse modulable qui va de 20 minutes à plus d’une heure. Liberté de ton, de temps, il se permet tout et le Gymnase, s’il montre une radicalisation de son humour et de sa rosserie, laisse présager d’un artiste en voie de transformation, prêt à devenir pamphlétaire arpentant la scène.

     

    Le Gymnase lui vaut des plaintes de la ligue contre le racisme (alors qu’il est membre donateur de la Licra depuis de nombreuses années), un procès avec Jean-Marie Le Pen –que ce dernier perdra-pour un texte particulièrement gratiné avec la voix de Serge Lama et une belle collection d’ennuis en général. Extrait d'un article du Nouvel Observateur en 1985, qui donne une idée assez fidèle de la fièvre régnant dans le vénérable théâtre tandis que Le Luron taille en pièces la classe politique contemporaine:

     

    Exaspérés

    par la

    classe politique,

    les Français plébiscitent

    Thierry Le Luron :

    un bébête-show à lui

    tout seul 

    Un appétit de carnage. On a payé, on veut

    que ça saigne. Au Gymnase, c'est pas des

    spectateurs, c'est des fauves. Enragés. Ils

    veulent tout bouffer. Même Thierry Le Luron,

    leur dompteur d'un mètre soixante-cinq monté

    sur ses talonnettes, ne peut plus les tenir. Il les

    regarde méchamment et, lorsqu'il leur sourit, il a

    les dents de Lecanuet enfant. Il n'a pas l'air de

    les aimer. Il leur jette leur viande comme s'il

    était pressé de se tirer. Il les sait dangereux.

    Il échappe de peu au lynchage lorsqu'il chante

    avec la voix de Serge Lama « Souvenirs, attention

    danger », où il évoque les légions de Le Pen

    aux crânes rasés, la rafle du Vel'd'Hiv', les

    ratonnades. « C'est pas vrai... Ah! tu veux

    mourir en scène comme Molière ! Ça va pas

    tarder à t'arriver, hé fumier ! »

    Le Front national est au poulailler. Les notables

    giscardo-barristes, en bajoues et triples

    mentons, sont embusqués dans leur loge, massifs

    et impassibles, avec des pudeurs de duchesses

    qu'on aurait attirées dans un endroit amusant

    mais peuple. A l'orchestre, ce sont les chiraquiens.

    Les chiraquiens humanistes, très sortables,

    sont dans les fauteuils, ils applaudissent

    lorsque Le Luron - Lama chante « Tous les

    hommes sont frères » et lance à son extrêmedroite

    : « C'est pas vrai, ça ?» Les chiraco - Le

    Pen, nerveux, nervis, s'agitent sur leurs strapontins

    ; ils sont prêts à quitter la salle si on fait trop

    de misère à Jean-Marie, mais ils restent, parce

    que après c'est peut-être les socialistes qui vont

    en prendre plein la gueule. Il y en a un qui dit à

    sa fille : « Je me demande pourquoi il a fait cette

    chanson, ça gâche le spectacle. »

    Le peuple de Coluche riait, celui de Thierry Le

    Luron applaudit et manifeste, mais il ne rit pas

    vraiment. Il compte les coups, les vacheries, les

    cadavres. Il est venu voir casser de l'homme

    politique. Il veut d'abord bouffer du socialiste,

    bien sûr. Il en redemande, il en veut dix portions.

    Mais il ne chipote pas sur le reste. Il est

    omnivore, il consomme aussi du Barre, du Giscard,

    du Chirac, une faim de loup. Les hommes

    politiques sont des dieux décriés qui sont peut-être

    morts et qu'on ne supporte plus qu'en caricatures,

    en morceaux. Coluche était un clown.

    Le Luron, c'est Tintin contre les politiciens,

    Guignol contre tous. Lisse, enfantin, démonia-

    que, il se cache derrière ses imitations, derrière

    Glandu, concierge rue de Bièvre, le personnage

    affreux qu'il a créé comme on crache une vieille

    haine, un cloporte pétainiste qu'il a tiré des

    routines de la France. Il se démène comme un

    diable pour ne pas être lui-même une seule seconde.

    Est-ce donc si terrible d'être Thierry Le

    Luron ?

     

    Ça cogne sec. Badinter : «Libère tous les

    malfrats parce qu'il est avocat et qu'il faut bien

    qu'il se constitue une clientèle. » Ça pisse pas

    haut mais ça marche toujours. Yvette Roudy :

    elle a l'air d'avoir fait une cure de thalassothérapie

    à Pierrelatte et elle a déclaré » « Je veux

    l'égalité des sexes et je prendrai moi-même les

    mesures. » Marrant. Huguette Bouchardeau :

    « Ne croyez pas que votre poste est déréglé, c'est

    bien sa tronche. » Ça, ce n'est pas de lui, c'est de

    Robert Rocca, à propos de Jules Moch. Les

    Arabes d'Aulnay-sous-Bois : «Ils ont des cadences

    infernales, ils font les trois-huit. Huit

    heures de grève, huit heures d'arrêt de travail,

    huit heures de prière... » Thierry Le Luron me

    précise : « Ce n'est pas moi, c'est Glandu qui dit

    .ça, Glandu citant Le Pen. Coluche a créé aussi

    des personnages infects et on ne lui a pas fait de

    procès d'intention. Glandu, c'est ignoble. Il a été

    collabo, il séquestre dans une cave sa femme

    parce qu'elle a été tondue à la Libération. J'ai

    pris mes distances avec lui, je le déteste... » Il

    dit : « C'est pas moi, c'est Glandu », comme un

    gosse qui dénonce un petit camarade. Si on lui

    arrache le masque de Glandu, on trouve un autre

    masque, avec une autre voix. On sait qui est

    Coluche. On ne sait pas encore qui est Thierry

    Le Luron. 

     

     

    Le gendre idéal achève de briser son image en acceptant une interview doublée d’une séance photo pour le magazine de charme Lui en décembre 1985. Les photos sont pornographiques, à la limite de l’action en justice. Thierry y pose en Glandu pervers, vêtu d’un imper mastic ou d’un pyjama, avec des pornstar ne cachant rien, adoptant l’uniforme nazi ou sm, les nourrissant d’un chapelet de saucisses ou en prière sur leurs fesses… Liberté toujours, volonté de choquer son public plutôt BCBG assurément et éclosion du type au mental de bazooka qu’il a caché si longtemps.

     

    Quelques semaines après cet ultime tir, juste en sortant de scène le 28 décembre, il sombre dans un coma dû à une méningite trois jours durant, en ressort en apprenant qu’il est condamné à un an de survie, part se faire soigner à Bethesda grâce à l’intervention de Jacques Chirac et Line Renaud, espère d’un espoir fou et éperdu, tente de tuer les rumeurs qui enflent et l’encerclent. Il reprend le spectacle au Gymnase mais sombre petit à petit, ne tenant plus le rythme.

     

    Il fait des allers-retours aux USA pour tout tenter, rentre à Paris pour montrer qu’il est vivant et persuader qu’il va bien puisqu’on le dit mort. Achète pour quatre millions une propriété somptueuse à Saint-Tropez, s’y retire tout l’été après l’avoir aménagée pour quatre autres millions. Il joue le jeu jusqu’au bout, assiste à la traditionnelle fête en blanc chez Barclay, imite pour les invités, donne le change. Il rentre en septembre à Paris, pressé de répéter son nouveau spectacle qui doit commencer le 29 octobre au Palais des Congrès. Il en signe la plupart des textes qu’il a écrit dans l’isolement à l’hôtel Claridge sur les Champs-Elysées, puis au Crillon, charge le contenu de Glandu et d’imitations encore jamais faites dans la capitale : Sinatra, Elvis, Tom Jones, Piaf, Brassens, Salvador…

     

    Assure une journée de promotion le 13 octobre en interviews radios et presse écrite.

    Puis sombre dès le lendemain, jusqu’à s’envoler définitivement le 13 novembre 1986 aux petites heures de l’aube.

     

    A chaque jour de bêtise, témoins muets du monde tel qu'il va, de la politique française "pas concernée, plutôt du genre consternée" comme dirait Gainsbourg, à chaque fois qu'il nous faut subir de fausses stars définies comme visionnaires alors qu'elles ne font que recycler, à chaque expression d'un monde qui tourne à l'envers, on se prend à regretter Thierry Le Luron.

     

    L’héritage

     

    On le sait peu, mais Thierry Le Luron était aux côtés de Coluche quand ils ont songé à la création des Restos du Cœur (de même que l’idée basique revient à Balavoine trois ans plus tôt).

     

    Egalement, Thierry est à l’origine des carrières de Pierre Desproges avec qui il a collaboré à plusieurs reprises dès 1974 et indirectement de Coluche, qui est tombé dans les bras de Lederman quand Thierry a remercié ce dernier.

     

    La mémoire collective adresse à Coluche la paternité de l’humour moderne tel qu’il s’est développé en France. Pas tout à fait exact, cette paternité étant partagée –de l’aveu même des deux protagonistes- par Thierry en grande partie. La carrière de Le Luron démarre en 1971 sur un humour calme mais plaçant dès le départ l’imitation comme un art en soi qui bascule du cabaret aux salles de spectacles. Premier imitateur à remplir l’Olympia et à partir en tournées. L’humour utilisé largue les amarres par rapport à Francis Blanche ou Pierre Dac ou encore Fernand Raynaud, même si l’héritage de ces derniers est intégré par Thierry. Mais d’une façon dépoussiérée.

     

    Dès 1974, avec l’émergence conjointe de Coluche, ce sont deux formes complémentaires d’humour moderne français qui éclosent.

     

    Ces deux-là, pour le meilleur et pour le rire, deviennent indissociables dans l’esprit du public et de ces années où tout est permis parce qu’ils font reculer les limites. Coluche balance outrageusement à la hache, Thierry utilise le scalpel. Jusqu’au mariage en septembre 1985, année décidément décisive pour Thierry, mariage en forme de farce poussée à l’extrême limite de l’acceptable, s’agissant d’une institution dont la pérennité n’est plus à prouver en France… il n’y a qu’à voir les manifestations délirantes auxquelles on peut assister en 2013 lors du débat sur le mariage pour tous.

    Touchant au mariage, à l’homosexualité, au travestissement, et visant directement le mariage –bien réel celui-là, de Véronique d’ Alençon et Yves Mourousi contre qui Thierry a décidemment la dent dure (extrait du discours : « Si nous avons une fille, nous l’appellerons Yves (…) si notre mariage est bidon, nous au moins, nous le disons…(…) comme le mariage de Yves et Véronique se passe dans les arènes de Nîmes, la mariée est au moins certaine d’avoir les deux oreilles…(…) » , la fusion publique de Thierry Le Luron et Coluche, deux genres, deux formats d’humour poids lourds, deux précurseurs échangeant deux baisers d’union devant les photographes, promenés dans une calèche dans Paris pour toutes les télévisions de France avant qu’ils ne disparaissent tous deux à six mois d’intervalle a des airs d’avertissements.

     

    Si Coluche, grâce aux restaurants du cœur, est célébré aujourd’hui avec faste, le souvenir de Thierry Le Luron reste encore discret. Une simple recherche sur internet permet de constater qu’il n’a pas été oublié. Reste donc le livre ou l’édition intégrale qui permettra de ramener cet humoriste de tout premier ordre, premier en bien des domaines tout simplement.

    Ce manque d’exploitation de ses exploits scéniques et télévisuels, avec les mêmes séquences rediffusées à l’infini quand il y a une telle matière encore délaissée et inconnue du public est regrettable : Thierry Le Luron a laissé un héritage humoristique qui mérite plus d’égards.

     

    Shopping - Surfing

     

    En CD ou DVD

     

    - Marigny 80 (pour les premières flèches vénéneuses, les imitations saignantes (Polnareff, Nohain, Marchais, Barre, Denise Fabre, Alice Sapritch…)

    - Coluche-Le Luron : Pour le meilleur et pour le rire (double CD) : le cd consacré à Thierry reprend l’essentiel du Gymnase 1985, 20 minutes de Glandu… du lourd !

     

     

     

     

    Liens

     

    http://www.dailymotion.com/fr/relevance/search/thierry+le+luron/1#video=xqaw8n

    (L’emmerdant c’est la rose)

    http://www.dailymotion.com/video/x41v8k_thierry-le-luron-glandu-au-gymnase_music

    (Gymnase 1985 – Glandu partie I)

    http://www.dailymotion.com/video/x41vz4_thierry-le-luron-glandu-au-gymnase_music

    (Gymnase 1985 – Glandu partie II)

    http://www.dailymotion.com/fr/relevance/search/thierry+le+luron/1#video=x41yzu

    (Gymnase 1985 – François Mitterrand)

    http://www.dailymotion.com/fr/relevance/search/thierry+le+luron+montr%C3%A9al/2#video=x4tvzv

    (Chez les Fafa – 1984)

    http://www.dailymotion.com/video/x41y73_thierry-le-luron-marchais-au-gymnas_music?search_algo=2

    (Gymnase 1985 – Georges Marchais)

    http://www.youtube.com/watch?v=8LVRCXcK7fY

    (Marchais à Marigny 1980)

    http://www.youtube.com/watch?v=64zFyFy3RnE

    (Marchais dans Champs Elysées)

    http://www.youtube.com/watch?v=zgjnv6YNzS0

    (Mireille Mathieu, dans une robe en forme de.. cruche, chantant en... "direct" son histoire d’amour)

    http://www.youtube.com/watch?v=MYAnyhsgeH0

    (interview par Philippe Bouvard de Denise Fabre après son accouchement)

    http://www.youtube.com/watch?v=NZRpCkkoFW4

    (Cérémonie des Césars 1982)

    http://www.youtube.com/watch?v=AwvajTPe0Ls

    (Marigny 80 : Georgette Lemaire / Les adieux de Jean Nohain (qui préfigure le futur Glandu) / Polnareff / Mouloudji / Sapritch)

    http://www.youtube.com/watch?v=9R1tF-1SUoo&list=PL0CE329B3285B0144

    (Dalida : Depuis qu’j’ai voté François)

    http://www.youtube.com/watch?v=lbad2oNt90w&list=PL60871EC20F6C86A8

    (Sapritch, encore… !)

    http://www.dailymotion.com/fr/relevance/search/thierry+le+luron/8#video=xfeaq9

    (Mariage Coluche – Le Luron)

    http://www.dailymotion.com/video/x517mq_thierry-le-luron-chez-eddie-barclay_fun?search_algo=2

    (Eté 1986, fête d’Eddie Barclay, Thierry donne le change)

     

    On attend avec impatience les spectacles suivants :

     

    - Marigny 83

    - Le Gymnase 85 en version intégrale (jamais diffusé jusqu’ici)

    - L’essentiel des performances télévisées peu ou pas rediffusées, excepté sur télé-mélody (interventions chez Drucker, Sabatier, aux Césars, extraits de tournées…)

     

    Dans le texte: 

      

    Marseille (1985- imitation de Leo Ferré au sujet de Gaston Deferre) 

      

    Avec la voix de Guy Lux: 

      

    Et bien pendant que LéoN (faute intentionnelle!) Ferré descend des cintres, il a toujours été un peu cintré, Sophie ma fille, prenez votre pied, votre pied de micro et retrouvons notre LéoN Ferré national qui est venu zici, c'est plus doux-t-à l'oreille, qui est venu zici nous chanter une chanson sur Marseille, une ville extraordinaire, il faut bien le dire, à toi LéoN Ferré: 

     

    (parlé, avec la voix et la tête de Léo Ferré) 

      

    Ta gueule Marseille! 

    Fille de pute! 

    Je te pisse au cul, Marseille... 

    Je te chie à la raie! 

     

    Chant: 

     

    Oh Marseille 

    Oh Marseille 

    Tes gangsters ont changé 

    Le moindre maquereau se prend pour Al Capone 

    Le record de la Saint Valentin est tombé 

    Avec les dix cadavres du bar du téléphone 

    Oh Marseille tu cumules les sinistres exploits 

    D'Auriol au juge Michel baîlloné par les balles 

    Et à ce fonctionnaire qu'on suicide deux fois 

    Pour masquer les trous de l'insécurité sociale 

     

    Oh Marseille! Oh Gaston 

    Véritable Parrain, dont le fauteuil usé 

    Est en déséquilibre 

    A des mots de truands lorsqu'il dit que Gaudin 

    Son fringant challenger est un petit callibre 

     

    Oh Marseille! Oh Marseille! 

    Que ton Maire a changé 

    Du temps qu'il embarquait dans la même pirogue 

    Les bourgeois du Prado qu'il avait débauché 

    Les marins, les dockers et les passeurs de drogue 

    Oh Marseille! Oh Marseille!

    Que ton Maire a changé

    Du temps où il criait avec patriotisme

    Votez Gaston Deferre si vous voulez barrer définitivement la route

    Au communisme

     

    Oh Gaston, tu renies

    Ces mots que tu as dit

    Lorsqu'en 83, pour sauver ton écharpe

    Tu as fait le tapin dans la rue de Paradis

    Pour récoler des voix de couleur écarlate

    Oh Gaston tu resteras

    Cet exemple tordu

    D'être en démocrasseux, le seul et unique maire

    A pouvoir te vanter d'avoir été élu

    Avec 3500 voix de moins que l'adversaire

     

    Oh Marseille! Oh Gaston!

    Le Mistral a tourné

    Fini l'état de grâce et tes ruses de squale

    Encore quelques scrutins, tu n'auras pour usé

    Que ton nouvel état de grâce médical

    Oh Marseille! Un beau jour

    Le Mistral révolté balaiera ta mairie et ses fausses cocardes

    Pour punir Gastounet de s'être mésallié

    A en faire rougir Notre Dame de la Garde

     

    Parlé:

     

    Oh Marseille, tu n'as plus qu'un vieux maire en sursis

    Qui n'a même pas l'accent, même pas la sariette

    Bafouille à la pétanque, ne boit pas le pastis

    Roméo décrépit

    Que n'aime plus

    Juliette

     

      

    Le mythique "L'emmerdant c'est la rose", déballé en direct sans prevenir en clôture de Champs Elysées, et repris par une salle entière composée... de militants socialistes de la fédération Lilloise. 

      

    Le dix mai, il y a trois ans 

    Fut un jour extraordinaire 

    A bien marquer d'une pierre 

    Oui vraiment 

    L'Elysée prit pour sept ans 

    Un drôle de locataire 

    Un socialiste exemplaire: 

    Mitterrand 

      

    L'emmerdant, c'est la rose 

    L'emmerdant, c'est quoi? c'est la rose 

    L'emmerdant, chante! c'est la rose 

    Crois-moi 

      

    La rose nous pique au sang 

    La France est au goutte à goutte 

    S'endettant coûte que coûte 

    Pour longtemps 

    A ce rythme, évidemment 

    C'est bientôt la banqueroute 

    Car c'est déjà la déroute 

    En chantant: 

      

    (faisant chanter la salle) 

    L'emmerdant, c'est la rose 

    L'emmerdant, c'est quoi? c'est la rose 

    L'emmerdant, chante! c'est la rose 

    Crois-moi 

      

    Ce soir à Champs Elysées, c'est la fiesta 

    L'inflation, elle, c'est pas la joie 

    Le téléphone et l'essence en font foi 

      

    (faisant face à la caméra plein cadre) 

      

    Je dédie au président 

    Cette chanson, ce poème 

    En forme de requiem 

    Pour ses tympans 

      

    (faisant chanter toute la salle) 

    L'emmerdant, c'est la rose ça détend 

    L'emmerdant, c'est quoi? c'est la rose 

    L'emmerdant, allons-y! c'est la rose 

    Crois-moi 

      

    Ca remplace un référendum, ça, on continue 

      

    (la salle reprend en choeur) 

      

    Et bien tout le monde est d'accord, encore une fois! 

     

    Le tout se termine par une poignée de main entre Thierry et Drucker à qui il persifle: "A bientôt Michel, c'était ta dernière émission..." 

      

    Chez les Fafa (1985- parodie de Ces gens-là de Brel, au sujet de Laurent Fabius, premier ministre de François Mitterrand)  

      

    D'abord... 

    D'abord y'avait le père 

    Qui était antiquaire 

    Dans une belle artère 

    Qui vendait des La Tours, M'sieur 

    Puis des meubles signés 

    A des privilégiés 

    Que son fils n'avait pas ruiné 

    Ou du moins pas encore 

    Qui était fier comme Artaban 

    De la carrière de Laurent 

    Qui est le plus diplômé  

    Des stars de la télé 

    Qui cause le mercredi 

    De nos emmerdements 

    Avec Mr Lanzi 

    Dans le rôle du clown blanc 

    Y cause de l'inflation 

    Et puis des restrictions 

      

    Faut vous dire Monsieur 

    Que chez ces gens-là 

    On ne dépense pas, Monsieur, on ne dépense pas 

    On compte 

      

    Et puis 'y'a la Françoise (épouse de Fabius) 

    Qui ne fait pas de façons 

    Qui vient à Matignon 

    Dans sa vieille Charleston 

    Mais crèche au Panthéon 

    Se fournit chez Fauchon 

    Une fille à pognon, une enfant de la haute 

    Qui vit mal dans sa peau 

    D'être riche et socialo 

    Qui se veut près du prolo 

    Avec son petit manteau 

    Avec sa petite auto 

    Avec son petit Lolo 

    Qui aimerait bien avoir l'air 

    Mais qui a pas l'air du tout! 

    Faut pas jouer les pauvres 

    Quand on est plein de sous... 

     

    Et puis... et puis... et puis il y a Fafa 

    Dauphin du Roi Soleil, qui n'a pas son pareil pour croire au père Noël 

    Avec ses 39 ans, faut le voir à Matignon 

    Causer en Président 

    Car ce charmant enfant 

    Ne sent plus pousser ses dents 

    Depuis que les sondages 

    Mettent François dans le potage 

    Et ça fait des grands sluuurp 

    Et ça fait des grands sluuurp 

    Méfie-toi de François, il est trop fort pour toi 

    Regarde ce qu'il a fait avec le gros Mauroi 

    On parle plus de Mauroi, non 

    Il l'a bien pressé, puis il l'a jeté 

    Quand il sentait plus bon 

    Puis il t'a pris toi, il t'a pris toi 

    Mais pour la pêche aux voix, s'il est mal barré, s'il lui faut Chaban 

    Et bien il le prendra 

    Et tant pis pour Fafa 

    Et puis il n'y a pas que Chaban 

    Ils sont tous là en rangs 

    Tous au garde-à-vous Monsieur 

    Pour régner un instant sur le gouvernement 

     

    Parce que chez ces gens-là, M'sieur 

    On ne renonce pas, M'sieur 

    On ne renonce pas... 

    Il n'est jamais trop tard, M'sieur 

    Pour devenir le roi. 

     

    Morceaux choisis... 

      

    "Régine... quand on pense qu'à une jambe près, ça faisait régime... Vous savez, elle dit toujours qu'elle a perdu un kilo ici, un kilo par là... en quinze ans, elle a perdu un camion de quinze tonne cette femme!... Enfin, presque, elle a gardé les pneus". 

      

    "Toutes les mères de France me voudraient pour gendre... je ne suis pas du tout certain que leur fille soient du même avis".

     

    Le soir du réveillon de Nouvel An 82, en Denise Fabre, juste avant minuit:

    "Et bien, je ne sais pas si votre dinde est prête, mais moi en tous cas je le suis!" 

     

    Parlant de Dalida

     

    "Quand le sphynx l'a vu, il s'est écrié: Maman!" 

     

    En interview:

     

    - Quelle est votre position sur l'homosexualité ou la drogue? 

    TLL: Assez relax...

    En Glandu:

     

    "Ca me paraît louche comme dirait Dalida, dont le frère est presbyte..."

    En Glandu, toujours...

    "Mitterand a son propre chef, qui lui mitonne ses petits plats, il l'a mis aux carottes Vichy... un souvenir sans doute... Miteux en a marre d'ailleurs, il lui a dit qu'il voulait changer de régime, l'autre lui a fait: "Mais Monsieur le Président, vous n'êtes pas le seul, il y aurait même comme une majorité de français..." Mais non! Pas ça! J'en ai marre des carottes Vichy, vous ne pourriez pas me faire autre chose? Il lui a répondu: "Ben je peux vous mettre aux navets" et Miteux lui a répondu "Je vous remercie, avec les films du beau-frère, j'ai ce qu'il faut"..."
     

     

    A propos de Line Renaud...

    "Ecoutez-là danser, regardez-là chanter!"

    Sur son humour vache...

    "Heureusement qu'il y a des mauvaises langues. S'il n'y en avait que des bonnes, on passerait sa journée au lit!"
     


    Et pour finir, une pas très connue, sur Danièle Gilbert (déjà surnommée "Midi-Crémière" par Thierry...

    Danièle Gilbert jouait alors une pièce de théâtre ayant pour titre "La rose et le choux-fleur". Le Luron assiste à la première, et lance un mot d'esprit cruel qui fera le tour du théâtre:

    "Le choux-fleur? Si le gratin est dans la salle, le four est sur la scène!"

     

    George Marchais: " Je suis un surdoué, à deux ans je résonnais déjà comme je résonne aujourd’hui ». 

     

    A propos de Paul Lederman :


    "Je dis "vous" à mon impresario. Avec l'argent qu'il me prend, j'ai toujours cru qu'ils étaient deux."
     


    Tags Tags : , , , , , , , , , ,
  • Commentaires

    1
    crislittoral
    Vendredi 10 Mai 2013 à 14:09

    Bravo pour ce  topic  hommage    ,   artiste de talent  ,  destin implacable   , merci  Thierry

    2
    isapi
    Mercredi 6 Novembre à 15:09

    Bonjour et merci pour toutes ces informations.

    Je suis touchée par l'attention de respecter sa pudeur. 

    D'autre part, je ne connaissais pas "l'ultime tir" quasi porno dans Lui : je souhaiterais savoir pourquoi il a accordé du temps à ce qui me paraît complètement étranger au personnage, voire incompatible. Voulait-il dénoncer quelque chose, faire réfléchir au statut de la femme objet par exemple ? 

    D'avance merci pour votre réponse ou des liens vers plus d'informations. 

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :